Certes, les progrès ont été importants depuis les dernières années… Mais est-ce suffisant? De plus en plus de femmes sont aujourd’hui présentes au sein des instances décisionnelles des organisations sportives amateures et professionnelles, et c’est une excellente chose! L’un des moyens afin d’atteindre une plus grande représentation des femmes, voire la parité de ces dernières, au sein de ces instances demeure l’imposition de quotas, définis comme « […] une exigence obligatoire qu’une proportion (ou un nombre donné) de postes décisionnels dans les organisations sportives [soient] occupés par des femmes (ou l’un ou l’autre genre). »[1] Mais au-delà du caractère controversé d’une telle obligation, la question demeure entière : les quotas contribuent-ils à réduire les iniquités en matière de genre dans les organisations sportives?

Dans son article publié dans la revue scientifique Sport in Society, la professeure Celia Valiente a justement porté son attention sur l’imposition de quotas par le gouvernement espagnol à l’ensemble des fédérations sportives de son territoire. La chercheuse a voulu savoir si de tels quotas atteignaient l’objectif visé, à savoir une plus grande présence des femmes aux postes de décision dans les organisations sportives du pays. Depuis 2014, le gouvernement espagnol exige en effet, de la part des 65 fédérations sportives nationales qu’il finance, la présence d’au moins trois femmes, ou d’un tiers de femmes, au sein du conseil d’administration (CA) d’une fédération, sous peine de sanctions économiques. Une telle mesure a-t-elle permis de corriger les écarts historiques constatés à ce chapitre?

Représentativité : objectif atteint!

L’analyse menée par la professeure Valiente permet de constater, dans un premier temps, que l’imposition de quotas a fait bondir la participation des femmes au sein des CA des fédérations sportives espagnoles. Comme en fait foi le tableau ci-contre, cette participation a doublé en seulement cinq années, et à un rythme beaucoup plus rapide qu’avant les exigences de Madrid quant aux quotas. Excellente nouvelle, puisque le pourcentage de femmes en place dans les CA (25 % en 2018) surpasse désormais le pourcentage de membres féminins (22 %) pour l’ensemble des fédérations sportives espagnoles.

Pouvoir : du chemin à faire, encore…

Néanmoins, lorsqu’il est question de la direction de ces fédérations sportives nationales, force est de reconnaître qu’il y a encore pas mal de pain sur la planche… La professeure Valiente constate à regret que la présence de femmes à la tête de ces instances sportives nationales demeure toutefois l’exception. À l’été 2019, il n’y avait que trois femmes à la tête de l’une des 65 fédérations sportives espagnoles, soit un maigre 5 % des dirigeants de fédés…

En somme, explique Celia Valiente, les progrès sont réels et tangibles, mais ils demeurent limités dans leur portée et leur amplitude. L’exemple espagnol illustre toutefois que lorsque l’État exige des fédérations sportives une présence plus importante des femmes au sein de leurs instances décisionnelles, les correctifs sont rapidement apportés et la situation évolue dans la bonne direction. Faut-il dès lors continuer d’appliquer le modèle coercitif afin de placer davantage de femmes à la tête des fédérations sportives? À l’inverse, faut-il tabler sur la présence de plus en plus importante des femmes dans les CA afin de voir le nombre de dirigeantes s’accroître tout naturellement? La question est lancée!

Article rédigé par :

François Normandin,
Professionnel de recherche – Pôle sports HEC Montréal

[1] Traduction libre. Valiente, C. (2020). The impact of gender quotas in sport management: the case of Spain. Sport in Society, p. 1.